LA PHYSIQUE QUANTIQUE

 

Jusqu'à la fin du XIXème siècle, le monde physique était expliqué par l'électro-magnétisme de Maxwell et la mécanique newtonienne. Il y avait une réalité physique objective que l'on pouvait étudier sans que l'observation du physicien perturbe cette réalité. Tout objet pouvait être localisé dans l'espace à tout moment, et répondait soit à l'analyse de la trajectoire d'un corpuscule, selon sa masse et sa vitesse (lois de Newton), soit à l'analyse du déplacement d'une onde (lois de Maxwell).

La physique classique est fondée sur les principes :

Après Laplace et Newton, la physique classique connaît son âge d’or à la fin du XIXème siècle. La physique classique est suffisante pour expliquer les phénomènes de la vie quotidienne car la vitesse quotidienne est infime par rapport à celle de la lumière. Après avoir décrit la nature quantique de la lumière, Einstein pose les principes de la relativité. La théorie de la relativité marque l'apogée de la physique classique.

LA RELATIVITÉ RESTREINTE

Pour des petites vitesses, celles de notre monde quotidien, les lois de Newton sont valides, même si elles reposent sur des approximations. Pour les vitesses proches de celle de la lumière, la relativité entre en jeu.

Pour des vitesses constantes, donc sans accélération, la relativité restreinte (1905) stipule que les lois de la physique doivent être les mêmes pour tous les observateurs, quelle que soit leur vitesses. Tout observateur peut trouver précisément le temps et la position que tout autre observateur assignera à l'événement, pourvu qu'il connaisse sa vitesse relative. Ainsi est définit le couple espace temps alors que la mécanique classique newtonienne s'inscrivait dans un espace à trois dimensions régit par un temps absolu   qui se déroule indépendamment des phénomènes extérieurs (la fuite du temps). L'espace et le temps sont inséparables. 

Deux événements simultanés dans un système de référence, ne le sont plus dans un autre système de référence. Le principe de relativité implique l'absence d'observateur privilégié. La description des phénomènes ne doit pas dépendre des différents observateurs. Chacun d'entre eux doit trouver la même loi physique. Chacun peut trouver les coordonnées référentielles des autres observateurs.

L'espace n'est pas tridimensionnel et il n'y a pas de temps absolu, chaque individu a sa propre mesure du temps qui dépend du lieu et de la manière dont il se déplace. Chaque objet en mouvement a sa propre horloge. Si des observateurs observent un phénomène tout en se déplaçant à des vitesses différentes, ils vont décrire différemment dans le temps les séquences événementielles et ce qui pour l'un survient dans son futur, apparaît pour l'autre dans son passé. Pour des vitesses proches de celles de la lumière, les séquences temporelles sont différentes selon les observateurs. Non seulement il n’y a pas de temps absolu, mais il n’y a pas non plus de séparation objective entre le passé et le futur. Le temps est déployé de telle sorte que passé et futur sont figurés à la fois (Olivier Costa de Beauregard). Ceci semble bien sûr impensable pour notre conscience ordinaire qui fait quotidiennement l'expérience d'une flèche du temps, l'inexorable écoulement d'un passé vers le présent puis le futur. 

De plus, le temps s'écoule plus lentement si la vitesse se rapproche de celle de la lumière (c'est la dilatation du temps). La vitesse augmente la durée de vie (dans des accélérateurs, une particule à durée de vie très courte voit sa durée de vie augmenter à de très grandes vitesses proches de celle de la lumière). Les horloges mobiles retardent par rapport aux horloges fixes 

Enfin, la formule E = mc²   pose l’équivalence de la masse et de l'énergie. La masse est une forme de l'énergie.

LA RELATIVITÉ GÉNÉRALE

La relativité générale est une théorie de la gravitation selon les résultats de la relativité restreinte, et implique la courbure de l'espace-temps. Elle s'applique aux objets près de fortes concentrations de masse. On vit dans un système de référence défini par quatre coordonnées : les trois coordonnées spatiales du lieu, et le temps. La relativité générale introduit la matière-espace-temps, la matière se déplaçant dans un espace temps de courbure variable. La relativité générale a donné naissance à la théorie du big bang.

LES PRINCIPES FONDAMENTAUX DE LA PHYSIQUE QUANTIQUE

L'étude du domaine microscopique va bouleverser les concepts de la physique classique. Les lois de Newton, applicables aux objets de grande taille, ne s'appliquent pas dans le domaine subatomique. Lorsqu’on se penche sur l'infiniment petit, il n'y a pas de monde physique objectif qui évolue de façon indépendante de nous. Le hasard remplace le principe de causalité. On ne peut connaître en même temps la position et la vitesse d'un objet quantique. Ce dernier peut être une chose et son contraire. Développée vers 1920-1930, la physique quantique est une théorie probabiliste qui heurte le sens commun. De plus, les phénomènes quantiques ne peuvent être représentés visuellement. Mais la théorie est toujours vérifiée par l'expérimentation qui vient la valider. La physique quantique ne donne pas une vision de la « réalité en soi » mais décrit des phénomènes avec exactitude.

Ainsi, au cours du XXème siècle, la science va réintroduire le mystère dans le monde, rendant obsolète la croyance matérialiste et scientiste pure.
 

1/ Les quanta : la notion de discontinuité
 
En 1900, Max Planck avance l'idée des quanta. Contrairement à ce que soutient la physique classique pour laquelle les échanges d'énergies se font régulièrement et graduellement, dans le monde subatomique, il y a une discontinuité des échanges d'énergie entre matière et rayonnement. Ces échanges s'effectuent par paquets d'énergie, par quanta. Cette discontinuité se retrouve au cœur de l’atome puisque, comme l’a avancé Bohr en 1913, les électrons occupent des orbites spécifiques et passent de l’une à l’autre sans aucune orbite intermédiaire. 

Les particules subatomiques ne sont pas des grains de matière solide mais des quanta, des paquets d'énergie en perpétuelle transformation. La matière nous apparaît comme stable et solide alors qu'en fait les particules forment des systèmes dynamiques qui subissent perpétuellement des transformations ou transmutations avec des phénomènes de création et d’annihilation, et ce flux dynamique est créateur d'énergie. La matière est en fait constituée d'espace vide traversé par quelques particules.

2/ La dualité onde - corpuscule : la double appartenance des particules quantiques
 
En 1923, Louis de Broglie associe une onde à tout corpuscule. Jusqu'alors, selon une logique apparente, une entité sub-atomique devrait être soit un corpuscule, soit une onde. En fait, pour la physique quantique, une particule est à la fois corpuscule et onde, mais elle n'est ni corpuscule ni onde. Selon la manière dont nous l'observons, elle apparaît soit comme particule, soit comme une onde. Comme Einstein l’avait montré en 1905 pour la lumière, la matière est aussi une coexistence d'ondes et de particules. L'apparence de la matière dépend de nous, elle nous apparaît tantôt comme des ondes, tantôt comme des particules. Cette apparence dépend de la façon dont nous observons la matière. Les ondes électromagnétiques peuvent se comporter comme des corpuscules. A tout corpuscule est associé une onde. La matière s’est dématérialisée, s’est « déchosifié » selon l’expression de Bernard d’Espagnat.

En physique classique : A est A (axiome d’identité), A n’est pas non A (axiome de non contradiction), et il n’existe pas de troisième terme qui soit à la fois A et non A (axiome du tiers exclu).

En physique quantique : A est A et non A (axiome du tiers inclus), mais par ailleurs, A n’est ni A ni non A.

L'état T (T comme tiers inclus) est un troisième terme qui peut se manifester à la fois sous l'apparence de A et de non A, mais qui   n'est ni A ni non A (Lupasco). Une particule est à la fois onde et corpuscule, mais elle n'est ni corpuscule ni onde. L’état T implique l'intégration du contradictoire (l’intégration de l'ombre).


3/ Le principe d'incertitude, ou d’indétermination

Un objet quantique est défini par une probabilité de présence. La connaissance de la réalité est impossible car la connaissance d'un paramètre exclut nécessairement la connaissance d'un autre paramètre. Le réel est connaissable seulement dans certaines de ses structures. Il y a des limites à la connaissance du réel, le réel est voilé. Le dévoilement du réel (le rêve du matérialisme) est impossible. Le réel en soi existe, indépendamment de l’homme, mais la science ne peut en fournir une connaissance complète. On ne peut connaître simultanément, et avec la même précision, la position et la vitesse d’une particule (principe d'incertitude d'Heisenberg énoncé en 1927). On ne peut que prédire une probabilité d'existence. Toute mesure modifie la grandeur mesurée. L’observation n’est pas neutre, contrairement à ce qui ce passe dans le monde macroscopique. On ne peut prédire le moment où un atome va se désintégrer. Le hasard règne sur le monde microscopique. Le monde quantique n’est pas représentable visuellement. L’électron ne tourne pas autour du noyau et on ne peut se représenter une trajectoire pour les particules. La physique quantique attribue à une particule une probabilité de présence en un endroit donné et à un temps voulu. Il est impossible de fournir un modèle de la réalité qui représenterait les événements eux-mêmes et non leur probabilité de présence. Cependant, cette représentation prédit correctement les micro phénomènes. La physique quantique décrit l'interaction de l'observateur avec le monde mais le réel n'est pas accessible.
 

4/ La complémentarité particule - antiparticule 

A tout événement correspond un anti événement. A toute particule correspond une   antiparticule. Une antiparticule a la même masse, le même spin que sa particule correspondante, mais elle a une charge électrique opposée. Tout contact d'une particule avec son double, de la matière avec l'antimatière se traduit par une annihilation, une disparition des deux, une dématérialisation, avec une libération d'énergie (transformation de la masse en énergie et émission d'un rayonnement de photons gamma, analogue à la lumière).
 

5/ Le principe de non séparabilité 

La physique classique étudie des objets séparés et indépendants. Elle suppose l'existence d'objets extérieurs que l'on peut étudier indépendamment. Dans le monde microscopique, à l'encontre du principe de causalité locale et de séparabilité, il existe des connexions non locales et inexplicables entre des éléments qui se révèlent tous interdépendants même s'ils sont séparés par de grandes distances : il y a violation du principe de séparabilité et on ne peut parler séparément de chacune des particules. Ces connexions, ces variables cachées non locales, sont situées hors de notre espace-temps, dans un autre niveau de réalité, mais elles ont une influence dans notre monde.

Bernard d’Espagnat fait la distinction entre le réel voilé qui ne sera jamais accessible par la science, (même si on peut en avoir une certaine idée et en faire l’expérience car il existe un lien entre ce réel voilé et notre monde d’existence) et la réalité empirique, le monde des apparences que décrit et analyse la science.

L'univers est une totalité inter reliée dans les moindres de ses éléments, et cette totalité s'oppose à la description du monde en entités séparés et indépendantes. Ainsi la célèbre expérience d'Alain Aspect en 1982 (confirmée par celle de Nicolas Gisin en 1997 sur une distance de dix kilomètres entre les deux particules) a montré que deux particules qui sont entrés en interaction à un moment donné gardent chacune des informations sur l'autre même si elles se trouvent éloignées l'une de l'autre (plus de 12 mètres dans l'expérience d'Aspect). Contrairement à ce que pensait Einstein, il n’y a pas de variables cachées locales (c’est ce que démontrait déjà des expériences précédentes sur la violation des inégalités de Bell).

Il n'y a pas de moi isolé indépendant, tout est interdépendant. Le monde ne peut pas être indépendant du chercheur. Observer, c'est perturber. Et pour Michel Bitbol, la physique quantique révèle que la Nature n'a aucune nature propre à révéler
 

LES PARTICULES ÉLÉMENTAIRES : BOSONS ET FERMIONS

Un atome est essentiellement constitué de vide. L’essentiel de la matière est concentré dans le noyau : neutron et proton, qui se subdivisent en quarks. En fait, il n’y a pas de véritable brique fondamentale, les particules quantiques ne sont pas des entités stables, permanentes et isolées. Toute particule peut se transformer et revêtir toute forme dans un véritable théâtre d’apparence sous l’œil de l’observateur. C'est grâce aux accélérateurs de particules que l'on a pu déchiffrer la structure de la matière, mais l'exploration de plus en plus approfondie de celle-ci nécessite des installations de plus en plus gigantesques et coûteuses, qui vont rapidement atteindre leur limite.

Les particules appartiennent au groupe des bosons ou des fermions. Les bosons sont des particules d'interaction. Les fermions sont des particules de matière.
 

1/ Les bosons 

Les bosons sont collectivistes, grégaires, de spin entier ou nul. Ils peuvent se rassembler dans le même état. Il existe quatre grandes familles :

- le photon (répond à la force électromagnétique) est responsable des interactions électromagnétiques.

- les bosons intermédiaires W+,   W-, et Z pour la force faible.

- les gluons colorés pour la force forte   (cohésion du noyau).

- l'hypothétique graviton pour la gravité. 

2/ Les fermions 

Les fermions n'occupent jamais le même nombre quantique. Ils sont individualistes, de spin demi entier et répondent au principe d'exclusion de Pauli qui implique la formation de couple d'électrons à spin opposé (deux fermions ne peuvent occuper le même état quantique au même moment). Les fermions cherchent à se différencier.

On distingue :

- les baryons (neutron et proton) sont en fait constitués de quarks qui s'assemblent par trois (une paire quark/ anti-quark compose un méson) mais ne sont jamais observables seuls (on ne peut connaître l’état élémentaire de la matière, peut-être même existe-t-il autre chose derrière les quarks). Ils répondent à l'interaction forte, faible et à l'électromagnétisme. Les six types de quarks ont été découverts de 1964 à 1995.

- les leptons chargés (électron, méson mu et méson tau) ou neutres (3 types de neutrinos). Les leptons sont observables seuls   (électron, neutrino). L'électron participe à la force faible et à l'électromagnétisme. Les neutrinos ne participent qu'à la force faible (ils sont neutres).

La matière est constituée de :

6 quarks (u,d)   (c,s)   (t,b)

6 leptons :       électron        neutrino électronique

muon           neutrino muonique

tauon           neutrino tauique  


La matière ordinaire est en fait de nature quaternaire, constituée de la première des trois familles de quarks (quark up et quark down), de l'électron et du neutrino électronique (bien que ce dernier interagisse peu avec la matière, mais joue un rôle important dans la radioactivité bêta qui permet la transformation réciproque des neutrons en protons, processus qui a permis la synthèse des éléments et de noyaux plus lourds à partir d'hydrogène). Les deux autres familles sont cependant indispensables pour que notre monde puisse exister.  

Selon la théorie de la relativité, toutes ces particules ont une vitesse inférieure ou égale à celle de la lumière.
 

LES QUATRE FORCES DE L'UNIVERS

Au sein de l’univers, il existe quatre types de forces ou d'interactions fondamentales : la gravitation et l'électromagnétisme sont connus depuis le XIXème siècle , la force nucléaire forte et la force nucléaire faible ont été découvertes au XXème siècle. Ces quatre forces ont les mêmes caractéristiques et les mêmes propriétés depuis la naissance de l’univers. 

La force électromagnétisme agit de l'atome à l'étoile (force magnétique). Elle joue un rôle important dans les processus biologiques. Elle concerne les électrons et les quarks. Les photons peuvent apparaître ou disparaître, changer d'énergie et de longueur d'onde. Un même photon peut passer d'une couleur visible à une couleur invisible par un changement d'énergie. La lumière visible n'est qu'un aspect particulier et partiel de l'électromagnétisme qui regroupe les forces électriques, magnétiques, phénomènes lumineux, lumière visible, onde radio, rayons X et gamma. L'œil ne reconnaît qu'une petite partie du spectre de la lumière. L'électromagnétisme est émis par paquet d'énergie (selon la théorie des quantas). La lumière est une onde de champs magnétique et électrique oscillants qui   se propage depuis les confins de l'espace jusqu'aux molécules. L'électromagnétisme gouverne le mouvement des électrons et joue un rôle important dans la stabilité des molécules. La vie est essentiellement un ensemble particulier de phénomènes qui se déroulent à l'échelle macromoléculaire, où agissent la force électromagnétisme et la force faible (même si celle-ci est moins importante d'un facteur 10.000). L’électromagnétisme lie les électrons aux atomes et gouverne les processus chimiques. C’est un pont entre l’infiniment grand et l’infiniment petit. 

La force nucléaire faible permet des changements de particules par rupture de l'unité des noyaux. Elle gouverne la radioactivité bêta c'est-à-dire la désintégration spontanée de certains noyaux avec transformation du noyau de l'atome (et donc modification du nombre de protons et de neutrons) et émission d'un électron. Elle concerne les électrons, les neutrinos et les quarks. Elle intervient dans l'interaction entre un courant leptonique et un courant nucléaire, dans des processus de destruction et de transformation, la transformation du neutron en proton (le neutron se transforme en proton + électron + antineutrino), change les électrons en neutrinos et vice versa (le proton se transforme en neutron + positron + neutrino), transforme les quarks up en quark down. 

La gravitation ne joue quasiment aucun rôle dans le monde microscopique. Elle règne dans l'infiniment grand (organisation des galaxies). Cette force agirait par échange de gravitons dans un champ gravitationnel (mais le graviton n'a jamais été observé et visualisé). 

La force nucléaire forte assure stabilité et cohésion des noyaux d'atome. Elle relie les quarks pour former les neutrons et les protons.
 

L'UNIFICATION DES QUATRE FORCES FONDAMENTALES 

Une théorie unifiant la force électromagnétique et de la force nucléaire faible a été élaborée dans les années 1960-1970. Cette théorie décrit la force électromagnétique et la force nucléaire faible comme les deux composantes de la force dite électrofaible, de la même manière que les phénomènes lumineux, électriques et magnétiques furent réunis dans l'électromagnétisme par Maxwell en 1864.

Les travaux de physiciens visent maintenant à unifier la force électrofaible avec l'interaction forte (c'est la théorie de la grande unification). Le boson de Higgs est supposé être le soubassement de cette théorie.

La supersymétrie tente d’unifier les particules d’interaction et de matière, bosons et fermions. Physique quantique et relativité générale sont deux théories qui, prises séparément, marchent très bien et sont validées par l'expérimentation sans jamais être prises en défaut. Mais le mariage entre ces deux théories n'est pas réalisé. Il n'y a pas de théorie qui unifie physique quantique et relativité générale (une théorie quantique de la gravité). Des pistes sont explorées avec par exemple un système supersymétrique, constitué de cordes, formulé dans un espace temps à dix ou onze dimensions, ou avec le leptoquark gouverné par une seule force permettant à un lepton de se muer en un quark. L’unification des quatre forces fondamentales constitue le défi du XXIème siècle. On retrouve là avec la supersymétrie le thème de la conjonction des opposés.

Au tout début du Big bang, les quatre forces sont unies, il n'y a qu'une seule force. C'est la symétrie parfaite et la non différenciation. Il y a une symétrie matière- antimatière. L'univers est stérile et la température extrêmement élevée. Dans cette grande chaleur initiale, les particules sont indifférenciées, sans masse. Elles sont toutes interchangeables. Cette indifférenciation initiale rend compte de la stérilité d'un univers parfaitement symétrique.

C'est le règne du vide quantique. Le vide est la matrice de la réalité manifestée. Le vide est un, immuable, inconnaissable, c'est le fondement de toute chose, et il exprime une tendance à la différenciation et à la manifestation dans l'ordre explicite. Le vide est l'état d'énergie minimum, l'état non excité de la matière. Il est inobservable mais il existe potentiellement. C'est un espace sans particule réelle et c'est un océan de particules virtuelles. Le vide porte en lui toutes les potentialités. Le vide est l'état latent de la réalité. Il est inépuisable, sans cesse mouvant, plein de la potentialité d'une infinité de particules. Le champ est quantifié quand une particule apparaît. Dans le vide originel, il n'y a pas d'espace-temps, pas de lumière, ni monde macroscopique créé. Il est comme s'il n'était pas. 

La supersymétrie (quatre forces unifiées) définit un vide symétrique entre bosons et fermions, à très haute énergie dans un univers très condensé et très chaud, mais riche d'une énergie latente prête à se manifester. 

Puis il y a successivement :

-  séparation de la gravité : c’est le stade de la Grande unification (trois forces unifiées), définissant un vide symétrique entre quarks et leptons, à plus basse énergie.

- séparation de la force forte et de l'électrofaible (interaction faible et électromagnétisme unifiés). Au moment de la séparation des trois forces, il apparaît un minime surplus de matière par rapport à l'anti-matière. Notre monde existe grâce à cette rupture de la symétrie matière-antimatière. Ce vide à symétrie brisée (séparation de la force forte de la force électrofaible), dans un univers en expansion inflationnaire à plus basse énergie, permet la création des particules. Il y a génération d'une information et d'une complexification à partir du vide sous sa forme indifférencié.

-   séparation de la force faible et de la force électromagnétique.
 

En brisant l'unité de ses forces, l'univers devient plus stable et fertile : c'est la naissance du cosmos. Du vide naît la lumière puis la matière. La matière commence à s'organiser : les quarks se combinent pour former des neutrons et des protons. Ces derniers s'uniront ensuite pour former des noyaux légers. Le refroidissement, la dilatation et l'expansion de l'univers permettent la complexification de l'univers, l'apparition des étoiles, du carbone et de la vie. La brisure de symétrie est un processus de différenciation de l'univers qui s’organise, génère de l'information et une complexification à partir d'un vide indifférencié.
 

ORDRE EXPLICITE ET ORDRE IMPLICITE – MONDE EMPIRIQUE ET RÉEL VOILÉ 

Sur les rapports entre l'esprit et la matière, la plupart des physiciens ne se prononcent pas et se contentent de constater la validité de la physique quantique. Un courant à part, en particulier représenté par David Bohm, suppose la présence d'une réalité plus profonde et inconnaissable dont la matière et l'esprit ne seraient que deux manifestations complémentaires. Ses théories sont compatibles avec le principe de non séparabilité, c'est-à-dire que des particules non contiguës dans l'ordre explicite le sont dans l'ordre implicite. 

David Bohm considère que l'esprit et la matière sont interdépendants et reliés, mais non pas causalement connectés. Ils sont mutuellement des projections enveloppantes d'une réalité élevées qui n'est ni la matière ni la conscience. 

L'ordre implicite (ou implié) est au-delà de l'espace-temps. C’est un vide plein de toutes les potentialités. C'est le monde comme il est.

L’ordre explicite, manifeste, déployé, est l’univers tel qu'il nous apparaît, articulé autour de l'espace-temps, mais créant une réalité qui nous semble séparée et indépendante. Ainsi, selon David Bohm, « nous nous accrochons dans une large mesure au monde manifeste considéré comme la réalité fondamentale où l'important consiste à disposer d'unités séparées, relativement tout au moins, mais en interaction. Dans la réalité non manifeste tout s'interpénètre, tout est interrelié  ». L'espace-temps de l'ordre explicite se développe à partir de l'ordre implicite. 

Tout comme la lumière et les ondes radio ont leur fondement dans un ordre commun, la conscience et la matière sont réunis au-delà de leur ordre implicite respectif, dans l'ordre super implicite. Cet ordre super-implicite est un univers auto-organisé dans lequel la conscience et la matière sont indissociables. L’ordre super-implicite est le fondement du monde dont il assure la cohérence. 

Les objets en mouvement, reliés par des champs, apparaissent dans l'ordre explicite, dans un référentiel espace temps, mais ce qui nous apparaît est sous tendu par un ordre implicite voilé. Puisque nous sommes immergés dans l’espace-temps, nous ne pouvons dévoiler le réel. Le réel nous est voilé (d'Espagnat), il est connaissable seulement en certaines de ses structures, et on ne peut que partiellement l’appréhender. 

Le réel voilé se situe au-delà des phénomènes. Le réel en soi, ou l'ordre implicite, est différent de notre monde quotidien. Le concept de la vitesse n'a plus de sens. C'est un espace multidimentionnel où le temps ne s'écoule plus : il y a instantanéité de tous les événements, il n'y a ni passé, ni présent, ni futur. Il n'y a plus de causalité mais information pure et synchronicité. Ce réel voilé se projette dans notre univers que nous expérimentons quotidiennement et notre cortex construirait une apparence structurée sur l'espace-temps et le principe de causalité. Cependant, parfois, notre inconscient serait le canal récepteur de l’intuition de l’unité de notre univers par le biais par exemple des expériences de synchronicité qui représentent un temps acausal où il n'y a   ni passé ni futur.

Dans l'ordre implicite, tous les événements sont repliés dans une totalité dont on ne peut rien dire et qui sous-tend l'ordre explicite. Selon David Bohm, cette   totalité inconnaissable (comme le savoir absolu de Jung, ou le Réel de Lacan) en perpétuel mouvement se manifeste à la manière d'un hologramme : c’est ce qu’il définit par Holomouvement. Il y a continuellement un processus de projection et d'introjection entre l'ordre implicite et l'ordre explicite. Les particules sont continuellement en déploiement dans l'ordre explicite ou en involution dans l'ordre implicite.

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